O Fortuna (topic commun)

O Fortuna

Ô fortune, comme la lune changeante en ses phases, toujours tu crois et tu décrois


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L’effervescence régnait dans le Zavist. Les robes de satin et de tulle noir transparents froufroutaient alors que chacune allait trouver sa place dans les différentes salles du cabaret. Les artistes répétaient une dernière fois leurs numéros et les employés veillaient à ce que tout soit en ordre pour l’arrivée des premiers clients. Esfir dardaient son regard acéré sur chaque recoin de chaque pièce, s’assurant que tout était conforme à son désir. Ce soir, elle organisait pour la première fois une soirée d’un goût très spécial, où la magie ne serait pas que celle des jolis costumes et des acrobaties ou transformations de ses artistes, mais bien la véritable sorcellerie, celle que l’on ne parvenait pas à toucher, celle qui se cachait derrière le voile de l’autre monde. Car voilà plusieurs semaines qu’Esfir s’était entichée de cette drôlesse qui contait fortune sur la place, vendant l’avenir pour quelques piécettes. Elle s’était également déjà produite dans les salons des riches de ce monde, devenant en peu de temps la coqueluche de Saint-Pétersbourg. Il n’en fallait pas plus pour qu’Esfir désirât elle aussi voir ce phénomène se produire dans son cabaret. Et pour l’occasion, Esfir avait décidé de faire du Zavist l’antre des sorcières. Ses filles étaient vêtues de telle sorte qu’elles ressemblaient à d’infernales bacchantes, son groupe de danseuses montrerait une pièce digne d’un sabbat luciférien et chacun se voyait confier un rôle aussi diabolique qu’enchanteur. Sa pièce maîtresse serait Azadeh, trônant dans la salle principale, décorée de tentures orientales, où elle lirait l’avenir à ceux qui mettraient la main à la poche…

Satisfaite du travail réalisé par ses employés, Esfir donna l’ordre d’ouvrir les portes. Alors que les premiers curieux franchissaient les portes de son enfer de stupre, la tenancière rejoignit Azadeh dans la pièce où elle se préparait. Esfir l’observa avec curiosité, partagée entre l’admiration pour son arnaque particulièrement crédible et le doute, toujours, que peut-être, l’avenir puisse se révéler à des êtres exceptionnels. « Ma chère enfant, c’est bientôt à vous. Ils doivent brûler de vous découvrir. »

Dans le cabaret, un public nombreux et disparate cheminait de salle en salle, s’émerveillant toujours plus de l’inventivité méphistophélique de chaque endroit découvert, s’arrêtant pour goûter aux mets délicates et enivrants, respirant le doux parfum envoûtant des jeunes filles précisément là pour leur bon plaisir, s’extasiant du spectacle qui leur était offert… Mais des frémissements, déjà… Une impatience couvait…celle de découvrir le clou de la soirée, l’enchanteresse étrangère, venue tout spécialement leur promettre un avenir doré…

♕ FONCTIONNEMENT
- Ceci est un topic commun : tout le monde peut participer à cette étrange soirée organisée au Zavist ; l'occasion pour les riches de s'encanailler et pour les plus modestes d'espérer se faire lire l'avenir... Vous êtes libres de profiter de cette nuit comme vous le souhaitez.
- @Azadeh Farhan pourra lire les cartes à tous ceux qui le désirent.
- Esfir sera dans l'ombre, vérifiant que tout se passe bien, et n'hésitera pas à venir vous voir.
- Pour toutes questions, n'hésitez pas à revenir vers moi.  

La surprise d'Azadeh avait été grande, quand cette femme vêtue de noir l'avait approchée pour l'inviter à officier dans l'une de ses soirées. Elle ne la connaissait pas, et n'avait même jamais entendu parler d'elle ; alors, elle s'était renseignée, et le portrait qu'on lui dressa suffit à l'intriguer. On lui parlait d'une sorcière, d'une veuve, d'une meurtrière peut-être - d'un mystère en tous cas. Ces quelques rumeurs rapportées avaient suffi à attiser la curiosité d'Azadeh, qui ne refusait que rarement une opportunité de travailler et de se montrer dans le monde. Si c'était l'occasion d'en savoir plus sur cette étrange créature, autant en tirer tout le profit possible.

Voilà donc Azadeh qui traverse la Place Sennaya se dirige vers le cabaret, tenant dans ses mains une note griffonnée sur un papier méticuleusement plié, comportant l'adresse de l'endroit où elle s'apprête à passer la nuit. Les descriptions qui lui ont été faites de l'endroit se mêlent dans son esprit, alors qu'elle tente d'en imaginer les contours. Elle arrive devant la bâtisse, à la modeste devanture. Trois coups lents sur la porte - comme la taulière le lui a précisé - et la voilà qui s'ouvre devant elle. Là, c'est un festival de parures d'or, de tentures venues d'orient, de couleurs chatoyantes mais harmonieuses, qui viennent délicatement titiller le regard du visiteur. Des femmes presque nues se prélassent et se pavanent, coiffées d'étranges couronnes de vigne. Azadeh s'interroge sur le bien-fondé de sa présence ici, dans cet univers si loin du sien ; très vite, elle se ravise à la pensée des roubles qui vont bientôt glisser de mains étrangères aux siennes, et pare son visage d'un mystère savamment calculé. Elle a travaillé ses traits jusqu'à devenir autre, non plus qui elle est mais qui ils veulent qu'elle soi. On l'accueille et lui indique la pièce dans laquelle elle va opérer sa magie - d'aucuns diront sa ruse. Azadeh s'installe à la table couverte d'une nappe de velours pourpre, et se saisit de son fidèle jeu de tarot.

Une silhouette sombre s'approche d'elle. « Ma chère enfant, c’est bientôt à vous. Ils doivent brûler de vous découvrir. » La cartomancienne lève le regard vers son interlocutrice, qu'elle n'avait pas encore aperçue. Elle reconnaît cependant immédiatement sa voix, celle d'une femme qui a connu plus de choses qu'on ne peut l'imaginer, se dit Azadeh. « Je n'en doute pas. Voyez-vous, les étoiles disent que cette soirée sera un succès, » s'aventure-t-elle à avancer, craignant soudain d'en avoir trop fait. Son petit spectacle ne repose que sur le précaire équilibre entre les visions feintes et la compréhension du monde qui l'entoure. « Mais que savent les étoiles de nos joies humaines, après tout ? » elle ajoute avec un petit rire modeste. Azadeh joue son personnage à merveille ; pourtant, l'intimidation face à cette femme, visiblement maîtresse du monde qui l'entoure, est réelle.